Effets multiscalaires de la fragmentation de la forêt par l'aménagement forestier sur la martre d'Amérique en forêt boréale de l'Est du Canada

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Cheveau, Marianne (2010). Effets multiscalaires de la fragmentation de la forêt par l'aménagement forestier sur la martre d'Amérique en forêt boréale de l'Est du Canada. (Thèse de doctorat). Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue. Repéré dans Depositum à https://depositum.uqat.ca/id/eprint/37

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Résumé

La perte et la fragmentation de l’habitat représentent un danger majeur pour les populations animales. En effet, les perturbations anthropiques toujours plus importantes
affectent les habitats et peuvent même menacer la survie de certaines espèces sensibles. L’aménagement forestier, bien que créant une perte d’habitat temporaire, s’étend sur
d’immenses superficies et ouvre le couvert forestier à des niveaux jamais expérimentés en forêt boréale de l’est de l’Amérique du Nord. La martre d’Amérique (Martes americana), une espèce reconnue comme sensible à la perte et à la fragmentation de l’habitat, peut servir
d’espèce indicatrice et guider l’aménagement forestier pour d’autres espèces ayant des besoins d’habitat similaires. L’objectif de cette thèse était donc d’évaluer les effets de la perte (proportion des coupes) et de la fragmentation de l’habitat (dispersion des coupes et quantité des lisières créées) sur la martre, et ce, à différentes échelles. Le projet a par ailleurs été réalisé sur le territoire de la Forêt Modèle Crie de Waswanipi où deux patrons de dispersion des coupes (agglomérées vs. dispersées) ont été utilisés, le second étant considéré comme une mesure d’atténuation des impacts sur l’utilisation traditionnelle du territoire par les Cris de
Waswanipi.
Le 1er chapitre avait pour objectif d’évaluer les effets de la perte et de la fragmentation de l’habitat par l’aménagement forestier sur la martre, tant à l’échelle du
paysage (100-300 km²) qu’à l’échelle des domaines vitaux (5-10 km²). Nous avons montré que l’abondance des martres diminuait de moitié dans les paysages aménagés par rapport à
un paysage naturel, et ce, malgré des quantités de forêts résiduelles similaires. Par contre, à plus fine échelle, l’occupation des sites, l’abondance et la condition physique des martres n’étaient que faiblement affectées par la perte d’habitat. Le patron de dispersion des coupes ne
semblait pas non plus affecter l’abondance, cependant la condition physique des martres était plus faible dans les paysages de coupes agglomérées. Nous concluons que les populations de martres sont certes sensibles à la récolte forestière, mais peu ou pas à la configuration et à la
quantité de coupes dans des paysages où ~50% de forêts résiduelles sont maintenues. Ces résultats suggèrent une plus grande tolérance de la martre à la perte et à la fragmentation de l’habitat en forêt boréale que dans d’autres régions plus méridionales.
Dans le 2e chapitre, nous voulions vérifier si cette plus grande tolérance s’observait aussi au niveau de l’utilisation de l’habitat des martres à l’intérieur de leurs domaines vitaux. L’objectif était de documenter la réponse individuelle des martres à la perte et à la
fragmentation de l’habitat ainsi que leur sélection d’habitat hivernal. Là encore, la proportion de coupes et la dispersion de celles-ci n’influençaient pas la superficie des domaines vitaux. Par contre, les domaines vitaux diminuaient avec la quantité de forêts mixtes, un type forestier pourtant rare dans le paysage. L’importance des forêts mixtes pour la martre s’est confirmée à la fois dans sa sélection des sites utilisés à l’intérieur des domaines vitaux et dans le positionnement des domaines vitaux et des zones d’activité dans le paysage. Parallèlement, les coupes forestières récentes étaient les habitats les moins utilisés à l’échelle des domaines
vitaux, et les milieux ouverts (dont les coupes) et perturbés (routes, lisières) étaient évités
dans les zones d’activité. Ainsi, bien que la martre n’utilise pas les parterres de coupes, elle semble bien les tolérer à l’intérieur de leurs territoires.
Le 3e chapitre avait comme objectif d’évaluer l’effet de la création de lisières forêt/coupe sur les mouvements de la martre. Selon la dispersion des coupes, les lisières
créées sont soit simples (coupes dispersées) soit doubles (coupes agglomérées). Les lisières simples représentaient des barrières aux déplacements des martres, qui évitaient de
s’aventurer dans les coupes. De plus, les déplacements étaient plus parallèles à la lisière et plus linéaires dans la zone 0-100 m que plus profondément dans la forêt. Par ailleurs, la distribution des pistes de martres par rapport à la lisière avait tendance à suivre la distribution
des pistes de proies qui étaient plus nombreuses près de la lisière. Les corridors forestiers (lisières doubles) créaient quant à eux un effet de canalisation des mouvements et concentraient les pistes de martres.
Finalement, le 4e chapitre avait pour objectif de développer une vision commune (Cris-scientifiques) de la martre en forêt boréale aménagée, en intégrant les connaissances traditionnelles des trappeurs Cris concernant la martre, de même que leurs perceptions des effets des coupes forestières sur cette espèce, avec les résultats des 3 précédents chapitres. La martre représente à la fois une source de revenus et un symbole du mode de vie traditionnel
pour les Cris. Les connaissances des trappeurs Cris se sont révélées très concordantes avec nos résultats aussi bien sur l’écologie de la martre que sur les effets des coupes sur ses populations. Nous pensons que le fait que les deux sources d’information (traditionnelles et scientifiques) proviennent du même territoire d’étude a largement contribué à ce résultat. Les trappeurs Cris se sont par ailleurs montrés nettement plus favorables à l’utilisation des coupes dispersées comparativement aux coupes agglomérées dans leurs territoires de chasse
familiaux. Cette vision commune de la martre pourrait contribuer à améliorer la compréhension mutuelle entre les Cris et les aménagistes forestiers et faciliter la gestion
collaborative de la forêt dans la région. Bien que la martre soit plus tolérante à la perte et à la fragmentation de l’habitat en forêt boréale, il est impossible de juger si les niveaux de rétention d’habitat imposés par la
législation actuelle seront suffisants à long terme pour maintenir cette espèce. Malgré le fait que les coupes dispersées n’apportent qu’un faible gain écologique pour la martre, il est clair que ce type de coupe est socialement plus acceptable pour les trappeurs Cris. Alors que seule
la première passe des coupes dispersées a eu lieu pour le moment, il est temps de planifier comment se fera la 2e récolte. Nous recommandons la rétention de corridors pour conserver une connectivité pour les espèces fauniques et la protection des peuplements mixtes qui sont fortement sélectionnés par les martres dans cette région.

Habitat loss and fragmentation represent a major threat for wildlife populations. Ongoing human disturbances affect habitat and could consequently threaten sensitive species
survival. Even though forest management creates temporal habitat loss, it covers vast areas and opens up the forest matrix to a degree not previously experienced in eastern boreal forest of North America. American marten (Martes americana) is reported as sensitive to habitat
loss and fragmentation. Marten could thus be used as focal species that could guide forest management for species having similar habitat requirements. The objective of this thesis was to evaluate effects of habitat loss (proportion of clearcuts) and fragmentation (clearcut dispersion and amount of created edges) on marten at different spatial scales. The study area was located in the Waswanipi Cree Model Forest, where two clearcut dispersion patterns
(clustered vs. dispersed) were used, the second being considered to mitigate negative impacts of forest harvesting on traditional activities of indigenous peoples.
The first chapter examined effects of habitat loss and fragmentation by forest harvesting on marten at the landscape (100-300 km²) and the home range (5-10 km²) scales.
We showed that marten abundance was two-fold higher in unharvested than in harvested landscapes, despite a similar proportion of mature forests. However, at a finer scale, marten site occupancy, abundance and body condition was only weakly affected by habitat loss. Clearcut dispersion pattern did not influence marten abundance, whereas body condition was reduced in clustered-cut landscapes. We conclude that marten populations are sensitive to
habitat loss but not to the configuration and the amount of clearcuts when ~50% residual forests are maintained in the surrounding landscape. These results suggest that marten is
more tolerant to habitat loss and fragmentation in coniferous boreal forest that in southern regions.
In the second chapter, we documented individual response to habitat loss and fragmentation as well as habitat selection within winter home ranges, in order to verify if this
greater tolerance was also found at smaller scale. Again, proportion and dispersion of clearcuts did not influence marten home range size. However, home ranges decreased with
the proportion of mixedwood forests, which are rare in the landscape. This importance of mixedwood forests for marten was confirmed by habitat selection at the home range scale as well as by home range and activity zone locations within the landscape. In parallel, recent clearcuts was the least used habitat at the home range scale and open (including clearcuts) and disturbed (roads and edges) areas were avoided in activity zones. Even though martens
did not use clearcuts, they tolerated such areas within their home ranges.
Chapter 3 evaluated effects of creating forest/clearcut edges on marten movements. Single edges were created in dispersed-cut landscapes whereas multiple edges were created in clustered-cut landscapes. Single edges represented barrier for marten movements, as they
avoided clearcuts. Moreover, movements were more parallel to the edge and more linear in the 0-100 m zone from the edge than deeper in the forest. However, marten distribution with regards to edge tended to follow prey distribution, being more abundant near edges. Forest
corridors (multiple edges) were highly used by marten (concentration effect) and movements were more linear in such habitats (canalization effect).

Type de document: Thèse ou mémoires (Thèse de doctorat)
Directeur de mémoire/thèse: Imbeau, Louis
Codirecteurs de mémoire/thèse: Drapeau, Pierre et Bélanger, Louis
Informations complémentaires: Comprend des résumés en français et en anglais. Thèse présentée comme exigence partielle du doctorat en sciences de l'environnement. Comprend des réf. bibliogr.
Mots-clés libres: martre amerique foret boreal est canada amenagement forestier fragmentation habitat
Divisions: Forêts > Doctorat en sciences de l'environnement
Date de dépôt: 13 déc. 2011 18:31
Dernière modification: 08 nov. 2012 16:36
URI: https://depositum.uqat.ca/id/eprint/37

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